Le magazine Réponses Photo a publié un article sur la série photographique “Le Geste du Saunier” de Bruno Palisson
Le 12 juillet 2022, le magazine français mensuel Réponses Photo a publié un article dédié à la série “Le Geste du Saunier” de Bruno Palisson, représenté par Art Trope Gallery.
Une série de Bruno Palisson sous l’œil critique de Yann Garret & Julien Bolle
Geste Artistique
Le travail de Bruno palisson, photographe et architecte a fait l’objet de nombreuses publications et expositions. Il nous a proposé cette série en hommage aux marais salants et à ses sauniers (appelés paludiers au nord de la Loire), dépositaires de gestes ancestraux. Malgré ses qualités artistiques, elle n’a pas fait l’unanimité, en tous cas pas sous cette forme et dans ce cadre précis.
La série « Le Geste du Saunier » est un hommage au métier de Saunier, l’exploitant des marais salants, reliant l’Homme, la Terre et la Mer. L’homme dans un profond respect du sol tire naturellement et avec patience le fruit de son travail, avec le même geste, depuis le XIVème siècle. Ce sont les moines Bénédictins qui ont créé au VIIème siècle les marais salants. Je voulais montrer que lorsque la terre est travaillée, redessinée par l’homme dans un profond respect du sol, celui-ci peut la renouveler sans destruction, pour nous proposer un nouveau paysage viable, pérenne et très esthétique. Une beauté immuable et préservée du VIIè siècle à nos jours. Avec patience et volonté nous savons donc bien faire…D’où cette approche d’une photo très dessinée, découpée, géométrique, d’où le carré composé de miroirs et de reflets, comme le sont les marais. Enfin, je ne voulais surtout pas montrer un homme, mais nous tous à partir d’un geste intemporel, d’où le noir et blanc. »
D’accord : Yann Garret
Les marais salants sont un exemple fascinant de nature domptée et on comprend aisément que leurs formes et couleurs séduisent si souvent les photographes. On a tous en tête l’une ou l’autre prise de vue aérienne de ces salines déclinant en mosaïque toute une palette de nuances. C’est tout le prix de Bruno, qui tourne le dos à ce pittoresque un peu rebattu en s’attachant exclusivement au travail ancestral du saunier, moissonnant la fleur de sel d’un geste lent et sûr. Ce geste devient d’ailleurs bel et bien le sujet de la série : les cadrages se concentrent sur les mains, les pieds nus et les outils du paludier, dont le corps est systématiquement renvoyé à une ombre ou un reflet. La métaphore photographique devient aussi évidente : comme le photographe dans son laboratoire armé de badines et cartons, l’homme des marais salants tire et révèle les gains de sel sous le projecteur du soleil.
Pas d’accord : Julien Bolle
La contrainte est source de créativité et de cohérence artistique, et le choix de se limiter à des images anonymes et graphiques prises en noir et blanc au format carré était je pense un parti pris intéressant pour traiter ce sujet. Cela dit, la contrainte peut aussi engendrer la répétition, pire la redondance, et je trouve que la série telle que présentée ici s’enlise dans de dangereux sables mouvants. Les points de vue et cadrages sont vraiment trop proches pour stimuler l’attention (combien de manches en diagonales et de corps coupés?). Peut-être aurait-il fallu oser varier davantage les compositions pour créer un peu de surprise, par exemple des photos en pied des sauniers prises en contre-jour, ou de dos, pour préserver leur anonymat. Par ailleurs je trouve le traitement noir et blanc trop peu contrasté, donnant aux surfaces un aspect grisâtre peu gratifiant. Bref, cela manque de sel à mon goût….